Visites à l’église Saint-Etienne

Bonjour Père Pierre BELHACHE, vous êtes curé de la paroisse de Saint-Sever et de Saint-Clément, et délégué diocésain de Rouen dans les relations interreligieuses. Depuis que l’église Saint-Etienne de Saint-Etienne-du-Rouvray est réouverte, elle est visitée par différentes personnes et notamment depuis lundi 24 octobre.

Pouvez-vous nous expliquer qui sont ces personnes?

Le lundi 24 novembre, on a reçu Hamdi Ben AÏSSA, un imam canadien, qui est venu sur la demande d’un jeune musulman de Rouen. En fait cet imam avait recueilli des lettres de soutien suite à l’assassinat du Père Jacques Hamel et a souhaité les déposer à l’église Saint-Etienne, donc là il a rencontré les paroissiens et leur a remis ses lettres.
Il y a eu aussi le 26 octobre la réception de la caravane de la Paix. La caravane de la Paix est une initiative du conseil des sages musulmans. Et le conseil des sages musulmans est un organisme indépendant, composé de savants musulmans de l’Université Al-Azhar, prestigieuse université égyptienne, pour le monde chiite. La caravane de la Paix existe depuis 2014; ils ont souhaité aussi faire une tournée en France, en Europe je crois plus largement et en particulier ils étaient présents à Paris, les 24 et 25 octobre. Ils ont souhaité aussi faire une démarche d’amitié le 26 octobre à Saint-Etienne-du-Rouvray.

Ils ont décidé de venir à l’église; y a t-il un lien avec la Porte Sainte?

Je ne suis pas sûr qu’ils savaient que la porte de l’église Saint-Etienne était érigée en deuxième Porte Sainte du diocèse mais ça fait partie de la démarche que nous avons faite, on n’a pas seulement fait la visite que je qualifierais de touristique. Quand on s’est réuni devant l’église, nous avons donné de la profondeur à nos rencontres que ce soit le 24 ou 26 octobre et on l’a fait vraiment dans une démarche de partage de foi. Donc à chaque fois j’ai mentionné aux personnes qui venaient que cette Porte Sainte était aussi une vocation de ce Jubilé de la Miséricorde. Et la Miséricorde, on le sait est un point très important dans la foi d’un musulman.

Quelle est la signification pour eux, musulmans, et pour nous, chrétiens?

La signification principale de ces visites est d’abord la profonde amitié qui nous lie, le désir aussi de se rencontrer entre croyants. Chacun de nous sait que la foi de l’autre n’est pas identique à sa propre foi, mais ça ne nous donne pas envie de nous diviser, ça nous donne envie au contraire de mieux connaître la foi de l’autre, d’être à l’écoute, et sur le lieu qui a été marqué par un assassinat, c’était le désir de redire ensemble que quelles que soient les différences que nous avons au niveau de la foi, nous sommes conscients que le projet de Dieu est un projet de Paix et de concorde avec les êtres humains.

Pourquoi avoir demandé à des paroissiens d’être présents?

Alors moi personnellement, j’ai reçu ces demandes en tant que délégué diocésain des relations avec les musulmans et je tenais à ce que ce soit vraiment la paroisse de Saint-Etienne-du-Rouvray qui puisse les recevoir. Cette église c’est l’église de la paroisse de Saint-Etienne-du-Rouvray. C’est avant tout une communauté qui les accueille, pas un bâtiment ! C’est pour ça que c’était très important qu’on travaille ensemble sur cette accueil.

Qu’avez-vous fait?

La première des choses a été de se rassembler à l’église Saint-Etienne, de faire donc une visite qui a été comme un mini-pèlerinage, en tout cas une démarche de foi en commençant par se rassembler sur le parvis de l’église, passer la Porte de la Miséricorde, se recueillir un instant devant le tableau qui a été peint par un musulman à l’occasion de cet assassinat du Père HAMEL, puis avancer dans l’église ensemble, se redire que de même que la nef d’une église, c’est l’image du vaisseau, la barque de l’église, de même on se rappelle que nous sommes tous quelles que soient nos religions dans la même barque, embarqué dans ce monde et on doit traverser ces eaux tumultueuses de la violence actuelle. Et puis ensuite se rassembler autour de l’autel, près du lieu où le Père HAMEL a été assassiné pour prendre un temps de recueillement, recevoir les messages de soutien de nos amis musulmans en visite. Et ensuite mercredi nous sommes allés à la salle Saint-Georges pour un moment de rencontre avec les acteurs locaux du dialogue islamo-chrétien.

Avez-vous retenu une phrase ou un moment?

C’est difficile de résumer mais, par exemple, le lundi l’imam canadien a fait une conférence, suite à la visite à l’église, à la mosquée de Saint-Etienne et il a essayé de mettre en avant les attitudes profondément bonnes. Alors il citait des personnes connues dans le monde musulman Abd EL-KADER en Algérie au XIXème siècle, ou à l’époque des croisades Salah AD-DÏN et il citait leur grande valeur d’âme en mentionnant comment ils n’avaient pas réagi par la violence aux violences qu’ils avaient subi. Je retiendrais ça de cette conférence.
Et pour la visite de la caravane de la Paix, alors là on a été émerveillé du rayonnement, je dirais, de paix qui se dégageait notamment de celui qui conduisait cette délégation, le professeur, Oussama NABIL, et une des choses qui nous a beaucoup réjoui c’était de la part d’un homme de science qui côtoie beaucoup d’élites, il a mentionné la qualité de nos initiatives locales, des liens fraternels que nous avons, il a encouragé les jeunes à continuer dans cette voie-là. J’ai trouvé que c’était une attitude de grande humilité et grande ouverture de sa part.

En conclusion, que peut-on retenir de ces visites?

Un peu comme toutes les sollicitations médiatiques que nous avons eues depuis l’assassinat du Père Jacques HAMEL, on peut retenir que ça a mis en valeur ce qui nous nous parait au quotidien tout simple, tout ces liens que nous avons à travers de multiples occasions. Ça les a mis au devant de la scène. On a souvent dit aux médias que finalement ce sont des choses qui existent un peu partout mais ils ne sont jamais visibles. Je crois que l’on peut retenir de ces visites que ce que nous vivons est à la fois ordinaire et quotidien mais en même temps ce n’est pas banal. Ça peut être un signe pour la société actuelle qui est traversée par des grosses difficultés, des tentations de violences importantes, on le voit à travers la campagne électorale en vue de la présidentielle, on le voit à travers les difficultés liées notamment à la présence des immigrants, le démantèlement de Calais actuellement. Nous pouvons être un signe de Fraternité aujourd’hui.

Merci Beaucoup pour cet interview. Bonne continuation !

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