Commentaires du 13 au 17 juin 2016 – Alain de Valon

Lundi  13  juin 2016  (Mt 5, 38-42)

Aujourd’hui, l’évangile de St. Matthieu nous montre Jésus continuant son « Sermon sur la montagne », et précisant un certain nombre de conseils exigeants, qui paraissent aller croissant chaque jour un peu plus. Ce qu’Il propose aujourd’hui peut paraitre bizarre : donner encore plus à celui qui vient de nous voler ? S’offrir aux coups de celui qui vient de nous frapper ?

Voilà un enseignement de Jésus difficile à mettre en pratique, et qui demande que son Esprit vive en nous. Nous sentons bien quand quelqu’un cherche la bagarre, et nous cherchons à nous défendre. Qui n’a jamais fait l’expérience de se sentir injustement attaqué ? Le désir qui monte alors du cœur est souvent de recevoir réparation. La marche à suivre que Jésus préconise est de ne pas suivre les réflexes humains si souvent motivés par la peur !

La loi « œil pour œil », énoncée au Deutéronome, était déjà une grande avancée pour le peuple hébreu : en prescrivant de ne rendre que le même mal pour un mal, elle mettait un frein à la possibilité d’une vengeance excessive. C’était limiter à une simple égalité la possibilité de réparation des torts : pas plus d’un œil pour un œil était suffisant, et admis.

Aujourd’hui, Jésus n’abolit pas la Loi, mais Il l’accomplit, c’est-à-dire, la mène à son aboutissement, à sa perfection. Pour désamorcer la violence, Il propose une autre voie que la riposte. La marche à suivre qu’Il préconise est de ne pas suivre les réflexes humains si souvent motivés par la peur ! Il ne s’agit pas de ne pas lutter contre le mal  extérieur, mais de combattre aussi celui qui est en nous, et de trouver l’attitude intérieure qui fait grandir.  Jésus nous apprend le chemin de la non-violence. Et c’est ainsi qu’il a agi, au moment de sa Passion : giflé par les soldats, dépouillé de sa tunique, épuisé par le poids de sa croix… Un tel héroïsme ne nous est pas demandé. Mais il nous est demandé d’aimer.

Seigneur Jésus, donne-nous la grâce de ton amour, afin d’avoir le désir et la force d’œuvrer avec Toi pour la paix.

Mardi  14  juin 2016  (Mt 5, 43-48)

Dans l’évangile de ce matin, St. Matthieu nous montre à quel niveau s’élève l’ambition de Jésus  pour nous : Il nous demande d’aimer ceux qui nous haïssent et de les traiter avec autant d’égards que s’ils étaient nos amis… Voilà qui sort de l’ordinaire !                                   Jésus nous fait comprendre qu’aimer doit se traduire par des actes, et fait l’objet d’un impératif. C’est quelque chose qui doit donc dépendre de nous. Aimer est un choix : notre attitude doit être identique, qu’elle s’adresse à notre prochain ou à nos ennemis. C’est ainsi que l’Esprit pourra former un amour tel que Jésus le désire, un amour inconditionnel, celui que Jésus nous fait entrevoir, et qui est dans le cœur de son Père et notre Père.

Devant cette parole de Jésus, nous sommes si impuissants ! En effet, si souvent, nous n’aimons que ceux qui nous aiment, nous ne connaissons que nos semblables ! Les païens eux-mêmes n’en font-ils pas autant ? Là, tout est dit : oui, il y a encore en nous des restes de païens… L’évangile n’a pas encore transformé notre cœur…                                             Dieu nous demande d’aimer nos ennemis, à la manière dont Jésus a aimé les hommes, pour que nous entrions dans un amour beaucoup plus large que notre cœur. Cet amour nous guérit de l’emprise du mal en nous. Aimer et prier pour nos ennemis, cela nous fait du bien, mais cela fait aussi du bien à tous les hommes.                                                                   Confions-nous à cet amour qui nous unit au Père et au Fils pour le salut du monde. Notre Père des cieux fait lever le soleil sur les bons et sur les méchants, Il fait tomber la pluie sur les justes et les injustes.  Pour Lui, pas d’ennemis : tous les hommes sont ses fils, tous, mais aussi chacun personnellement.                                                                                           Seigneur Jésus, donne-nous la grâce de pouvoir faire quotidiennement de petits actes d’amour, en dépit et au-delà de nos résistances : ils seront les pierres pour bâtir un monde plus fraternel sous le regard du Père de tous les hommes, nos frères.

Mercredi  15  juin 2016  (Mt 6, 1 – 6 . 16 – 18)

Aujourd’hui, dans l’évangile de Matthieu, Jésus nous dit que ce que nous faisons « pour être vu des hommes », et avec quelles démonstrations ridicules, Dieu ne le voit même pas. Mais ce qui est fait pour Lui, et seulement pour Lui, n’échappe pas à son regard, parce qu’il en est touché, et qu’Il y attache un grand prix. Non seulement notre Père a de très bons yeux pour voir le fond de notre cœur, mais son regard est bienveillant. Il ne donne pas de punitions, Il donne la vie !                                                                                                                 Bien sûr, nous n’avons pas souvent la tentation d’agir dans l’intention de nous donner en spectacle, mais Jésus est plus perspicace que cela. Il ne vise pas seulement la vanité de tous ceux qui cherchent à attirer l’attention sur eux ; nous avons quelque part un certain souci de ce qu’on va penser de nous, souci qui reste souvent dissimulé au fond de nos calculs les plus désintéressés ; dissimulé, mais bien présent. Sans doute serait-il vain de chercher à le déraciner radicalement. Et peut-être même nous priverions-nous ainsi d’un des organes nécessaires à notre moteur psychologique…

Mais pour Jésus, le vrai travail est intérieur. C’est pourquoi Il invite ses disciples à ne pas jouer sur les apparences, mais à approfondir leur engagement profond : partager, prier, jeûner en secret… Cela signifie : agir toujours sous le regard du Père, en référence à Dieu, et à Dieu seulement. Est-ce possible ? S’alléger au fil des jours du regard d’autrui, et même de notre propre regard sur nous-mêmes. Oh ! Quelle préoccupation envahissante que ce regard si nous n’y prenons pas garde. C’est un défi lancé à tous ceux qui veulent afficher leur nom, dans tous les domaines… Se faire voir pour exister !

Cherchons plutôt à ne pas briller, mais à brûler… Lorsque tu pries, tiens – toi dans le secret, ferme ta porte. Car tout est de Lui, et par Lui, et pour Lui. Quoi que nous fassions, c’est bien dans le secret que nous L’appelons : Abba. C’est dans le secret qu’Il nous comblera de sa plénitude !

Jeudi  16  juin 2016  (Mt 6, 7 – 15)

La prière que Jésus a apprise à ses disciples nous est donnée ce matin dans l’évangile de Matthieu. Elle est une prière de communion. Communion avec le Fils, avec qui nous osons dire à Dieu : « Père », et qui met en notre bouche ses propres mots, pour que nous connaissions le visage de miséricorde de Dieu et pour que le Père reconnaisse en nous ses enfants bien-aimés. Mais aussi, communion avec l’Eglise qui la répète depuis l’origine. Quand nous prions, ce n’est pas pour faire connaître à Dieu nos besoins, ni nos pensées. Il les connait, avant nous et mieux que nous. C’est pour entrer avec Lui en dialogue et en partage.                                                                                                                                                       Au cœur de cette prière, la demande du pain : le pain de chaque jour, qui assure notre vie matérielle ; et le pain qui donne la vie éternelle et que nous recevons dans la Parole de Dieu et  dans la communion eucharistique.                                                                                Combien de fois n’avons-nous pas le sentiment de rabâcher, même lorsque nous prions cette prière extraordinaire du Notre-Père. Jésus insiste sur notre engagement concret dans la prière. En demandant le pardon de nos offenses, nous ne pouvons que pardonner, ou tout au moins, vouloir pardonner et nous mettre en route pour pardonner.  Nous savons bien que le pardon sera toujours à donner et à recevoir, souvent pour les mêmes raisons. La prière du Notre-Père nous met en présence de Dieu, et nous sommes appelés à Le découvrir toujours plus à travers son pardon et dans nos relations aux autres.                         Et quand nous prions Dieu de nous délivrer du mal, nous L’invitons à se faire proche de nous pour traverser l’épreuve avec Lui, sans désespérer et en gardant foi en la vie. Plus encore, nous Lui demandons de nous rendre libres du mal qui est en nous : libère-nous, Seigneur, des chaines de la violence sans fin, de la tentation de répondre au mal par le mal. Délivre-nous du mal revient à dire : « Apprends-nous à aimer » !

Seigneur Jésus, donne-nous la grâce que notre vie, par cette prière, devienne de plus en plus une vie de communion avec tous nos frères, qui sont les fils, proches ou lointains, de l’unique Père.

Vendredi  17  juin 2016  (Mt 6, 19 –23 )

Aujourd’hui, St. Matthieu nous transmet le message de Jésus, qui nous demande de savoir discerner quels trésors nous devons amasser. Trésors terrestres, destinés à être rongés par les mites, ou dérobés par les voleurs, ou bien trésor céleste, qui est éternel : l’amour de Dieu ? Et Il précise que notre cœur est là où se trouve notre trésor. Il nous parle aussi de notre œil, qui, selon qu’il est sain ou malade, nous fait sombrer dans les ténèbres, ou nous éclaire.                                                                                                                                                           Le cœur et l’œil… Deux moyens de percevoir, de sentir, pour lesquels Jésus nous avertit qu’un discernement s’impose. Le cœur s’attache à ce qu’il aime : alors, autant qu’il s’ancre sur ce qui ne déçoit pas, et ce qui est durable. Quant à l’œil, il peut, lui aussi, s’attarder sur ce qui attriste, avilit, salit ; ou au contraire se réjouir de ce qui est beau. Il peut choisir de ne retenir que ce qui critique, détruit, ou de mettre en lumière ce qui construit, édifie, fait grandir.                                                                                                                                                       Et c’est bien vrai que nous gardons les « trésors » que nous avons accumulés : Ils sont là, nous comptons sur eux. Souvent, ils nous soucient. Notre cœur y est parfois si fortement attaché que nous en devenons prisonniers. Et il est bien vrai aussi que notre regard sur nos frères n’est pas toujours indulgent, que nous avons tendance à les juger, et à les condamner…                                                                                                                                             Mais depuis le début de la semaine, Jésus nous dit et nous répète que l’important, dans notre vie de chaque jour, c’est ce que nous vivions intimement avec Lui, dans le secret, mais aussi, dans sa lumière. Les moments de silence que nous passons avec Lui, quand nous remettons tout notre être entre ses mains, sont des trésors incomparables. Nos joies, nos soucis, nos projets, les frères que nous aimons – et ceux que nous aimons moins et que nous voudrions aimer davantage – tout ce que nous Lui confions est pour nous une merveilleuse libération. Ces quelques instants quotidiens de cœur à cœur avec Jésus nous font découvrir, un peu plus chaque jour, le seul trésor qui comble notre cœur : Dieu qui se révèle en son Fils.