Solennité de l’Assomption en la cathédrale Notre-Dame de Rouen – 15 août 2016

Solennité de l’Assomption en la cathédrale Notre-Dame de Rouen : monition d’ouverture et l’homélie de Mgr Lebrun :

Monition douverture

Notre-Dame de l’Assomption est la patronne principale de la France, de notre diocèse de Rouen, de notre cathédrale. Nous prierons intensément pour notre pays et notre diocèse. Ils traversent bien des épreuves mais votre présence est déjà une consolation. Nous pensons encore à la famille du Père Jacques Hamel, à sa paroisse, sa ville de Saint-Etienne-du-Rouvray, aux 13 jeunes  décédés dans le dramatique incendie. Il y a aussi les épreuves que chacun d’entre vous peut rencontrer plus ou moins secrètement, dans sa vie professionnelle, dans sa vie familiale ou dans le secret de son cœur.

C’est tout cela que nous voulons confier à la Vierge Marie, à sa tendresse dont nous avons tant besoin !

Homélie

« Le dernier ennemi qui sera anéanti, c’est la mort. »

Frères et soeurs, cette affirmation de St Paul résonne fortement à nos oreilles et dans nos coeurs. Pour beaucoup, c’est aujourd’hui une interrogation : est-elle vraiment vaincue cette mort qui est venue prendre le Père Jacques Hamel de manière si cruelle ? Est-elle vraiment vaincue cette mort qui a frappé 13 jeunes réunis pour un anniversaire ? Est-elle vraiment vaincue cette mort qui sème la terreur au Moyen Orient pour ne pas dire partout dans le monde ? Avec une ultime demande : est-elle vraiment vaincue la mort qui nous attend tous !

La fête de l’Assomption est la fête de la mort vaincue ! Marie est entrée dans le ciel sans connaître la mort. Elle est montée au ciel corps et âme. Certes la Vierge Marie est unique mais ce n’est pas un mirage ou un mythe. Marie est une jeune fille de Galilée, fabriquée, si j’ose dire, comme vous et moi, une Maman. Par elle, Dieu révèle jusqu’où va son amour pour l’humanité. Par la montée de Marie au ciel, corps et âme, Dieu révèle le projet de son cœur : la mort vaincue, la vie vainqueur.

La mort nous révolte, encore plus la mort donnée avec violence et dans l’injustice. Frères et soeurs, c’est une grâce qui nous est faite de ne pas être entraînés dans la spirale. Oui, frères et sœurs, vous êtes venus, nous sommes venus parce que Dieu nous aime et nous en fait la grâce. Cette grâce à un nom aujourd’hui : Marie. Et ce nom n’est complet que lorsque nous l’appelons Maman, Maman de Jésus, notre Maman … du Ciel !

Goûtons avec Marie la joie de la vie vainqueur. Attardons-nous comme le fait l’enfant qui ne veut pas quitter sa mère. Craintifs, apeurés, nous le sommes. Ne lâchons pas la main de la Vierge Marie ou reprenons-la. Cet après-midi, j’irai à nouveau à Notre-Dame de Bonsecours prendre sa main. Dans une semaine, je consacrerai mon ministère épiscopal à Marie, Notre-Dame de Lourdes, au milieu des malades, ceux qui sentent diminuer les forces de la vie. Ne sommes-nous pas tous malades dans notre cœur ? Osons le dire : nous sommes tentés de juger nos amis musulmans fautifs ou, plus subtilement, nos gouvernants trop faibles, nos juges imprudents ou bien votre Église – votre évêque- trop naïfs ; oui, tentés de tirer notre épingle du jeu voire de nous retirer du grand jeu de la fraternité, de rentrer chez soi, de fermer la porte. Faire cela, c’est lâcher la main de Marie, c’est oublier la porte de la miséricorde grande ouverte cette année.

Je vous invite tous quelques soient votre foi, vos doutes et vos colères à prendre la main de votre Maman du Ciel. Dites au moins un « Je vous salue Marie » chaque jour, si possible plusieurs fois. Marie veut vous conduire au Ciel où elle est entrée la première à la suite de son Fils Jésus. Pourquoi lâcher sa main ?

Le chemin peut être rude, en pente raide, comme une montée à Bonsecours. Marie nous entraîne sur le chemin de l’espérance, le chemin de la vie.

« Marie se mit en route et se rendit avec empressement vers la région montagneuse », raconte l’Evangile.

Aurions-nous oublié que, sur notre terre, nos vies sont montagneuses ? Marie, à peine est-elle enceinte, se rend auprès de sa cousine qui, elle aussi, donne la vie malgré son grand âge. Notre société semble âgée et stérile comme Élisabeth. Mais, voilà, Dieu ne s’y résigne pas. Il ne peut pas se résigner. C’est pourquoi il met dans nos cœurs l’horreur du mal et le désir de faire le bien. Passons du désir à l’action !

Est-ce possible ? Accueillons la confiance de Marie, sa foi de jeune fille d’Israël vivant sous occupation, dans la crainte et l’attente d’un Sauveur. Accueillons son chant d’action de grâce : « Sa miséricorde s’étend d’âge en âge ! Il renverse les puissants ! Il se souvient de son amour ! »

Manifestons notre foi ou notre désir de retrouver la foi : « Il élève les humbles ». Venons chaque dimanche retrouver son Fils dans nos églises pour le recevoir comme Marie l’a reçu en elle. Venons chaque dimanche, avec nos défauts, nos péchés, nos peurs recevoir l’Esprit de Dieu comme Marie l’a accueillie. Venons chaque dimanche reprendre avec Marie la direction des régions montagneuses de nos vies, pour les rendre fécondes de paix, de justice, d’amour. Ce sera un bel hommage au Père Jacques Hamel, fidèle à célébrer pour vous la messe.

Frères et soeurs, ne lâchons pas la main de Marie ! Nous saurons alors que nous appartenons au Christ et donc au Ciel : « de même que tous les hommes meurent en Adam, dit saint Paul, de même c’est dans le Christ que nous recevrons la vie ! … D’abord le Christ, et ensuite, lors du retour du Christ, ceux qui lui appartiennent. »

Frères et soeurs, choisissez la vie ! Choisissez Marie. Elle est votre Maman du Ciel, votre Maman pour le Ciel !

✠ Dominique Lebrun

Archevêque de Rouen