Homélie de la Saint-Fiacre

Célébration de la Saint-Fiacre
dimanche 2 septembre 2018

Basilique du Sacré-Cœur (Paroisse Saint-Filleul)

Dt 4, 1-2.6-8 ; Ps 14
Jc 1, 17-18.21b-22.27 ; Mc 7, 1-8.14-15.21-23.

Homélie

Faut-il se laver les mains après avoir jardiné et avant de manger ?

Frères et sœurs, ce que dit Jésus est d’un autre ordre. La grande question soulevée par Jésus est le rapport que nous entretenons entre nos gestes, nos paroles extérieures, et l’intérieur de nous-mêmes.

Malheureusement, en écoutant cet évangile, sont présents à mon esprit –peut-être aux vôtres- les actes ignobles accomplis par des prêtres et des évêques chargés de porter la bonne nouvelle. L’écart entre ce qu’ils sont et ce qu’ils font est insupportable. Je ne peux que vivre ces jours dans une grande compassion pour les victimes, dans une grande humilité pour ne pas dire une grande humiliation.(1)

Si j’ai bien compris, la Confrérie de St Fiacre fait le chemin inverse. En août, vous écriviez « désormais, les activités de la Confrérie ne sont plus limitées à l’organisation festive … mais s’inscrivent dans une continuité pédagogique et caritative ». Je comprends que vous voulez que ce qui se passe à l’extérieur devienne un chemin intérieur pour inspirer les plus jeunes et aller vers les plus démunis.

En fait, Jésus passe de l’extérieur à l’intérieur non pas pour dire que l’extérieur n’est pas beau et bon. Il signale le vrai combat, le combat intérieur : « c’est du dedans, du cœur de l’homme que sortent les pensées perverses (Mc 7, 15) ».

Notre conscience nous dit ce qui est bon, si nous l’écoutons. Des commandements nous aident à voir clair. La prière et les exercices de piété, comme une procession aussi. Mais, en définitive, c’est ce qu’il y a dans notre cœur qui fait de nous une personne bonne ou mauvaise. Qu’est-ce que reproche Jésus aux pharisiens qui l’interrogent sur les pratiques de quelques-uns de ses disciples ? « Ce peuple m’honore des lèvres mais son cœur est loin de moi (Mc 7, 6) ». Avoir le cœur proche de Dieu, quelle belle définition du croyant, du chrétien !

Nous sommes dans la basilique du Sacré-Cœur de Jésus, qui honore le cœur de Dieu. « Moi, vous savez, je suis catholique », entendons-nous. Puis-je dire : « mon cœur est proche de Dieu » ? Est-ce que j’entends le cœur de Dieu se faire proche du mien ?

Avoir le cœur proche de Dieu, qu’est-ce que cela veut dire ? Deux cœurs se rapprochent quand ils s’aiment, quand l’un aime ce que l’autre aime, lorsqu’ils battent au même rythme, par exemple au rythme de saisons. Aimons-nous Dieu ?

Hier, 1er septembre, l’Eglise catholique et l’Eglise orthodoxe vivaient la journée de prière pour la sauvegarde de la création. Nous étions invités à garder notre cœur près du cœur de Dieu Créateur. Comment engendrer ou accepter la défiguration et les dérèglements engendrés par l’homme et garder son cœur près du cœur de Dieu Créateur ?

Votre confrérie ancienne de trois cents ans voit son existence et sa mission renouvelées par la prise de conscience qui se fait petit à petit à l’égard de la planète. Veillez à le faire avec un cœur pur, c’est-à-dire proche du cœur de Dieu. Il vous regarde, il regarde vos fleurs, vos jardins, vos fruits, vos plantes avec grande joie. Il regarde encore plus vos cœurs. L’harmonie de vos jardins doit refléter l’harmonie de vos cœurs, la bonne entente entre vous et votre joie de faire plaisir, de procurer du plaisir.

L’exhortation de st Jacques vous touche certainement : « Accueillez dans la douceur la Parole semée en vous ; c’est elle qui peut sauver vos âmes (Jc 1, 21) ». Et il poursuit : « Mettez la parole en pratique, ne vous contentez pas de l’écouter, ce serait vous faire illusion. Devant Dieu notre père, un comportement pur et sans souillure, c’est de visiter les orphelins et les veuves dans leur détresse (Jc 1, 22-23) ».

Votre décision « d’apporter une aide face aux défis à relever contre les nouvelles pauvretés en monde rural » ; votre désir « d’accompagner des professionnels de l’agriculture et leurs familles en difficulté financières et morales » est une décision qui touche le cœur de Dieu.

Frères et sœurs, dans la joie de ce jour, dans l’harmonie de notre célébration, dans les efforts déployés pour le fleurissement de la basilique et les parterres de fruits et légumes, que le Seigneur puisse voir la décision de nos cœurs d’être proche de Dieu notre Créateur, notre Père et notre Sauveur.

✠ Dominique Lebrun
Archevêque de Rouen.

(1) Lire la Lettre du Pape François au Peuple de Dieu