Accompagnement Spirituel durant le temps du procès de l’attentat de St Etienne du Rouvray

Cette page a pour vocation d’accompagner spirituellement tous ceux et celles qui le désirent durant toute la durée du procès de l’attentat de St Etienne du Rouvray qui a couté la vie du Père Jacques HAMEL, martyr.

Déclaration de Mgr DOMINIQUE LEBRUN,
archevêque de Rouen, après le Procès pénal
suite à l’assassinat du Père JACQUES HAMEL

« Le choix du bon larron »

Le verdict est tombé. La famille du Père JACQUES HAMEL, GUY et JANINE COPONET et leurs enfants, les Sœurs et la communauté de la paroisse de Saint-Étienne-du-Rouvray, les prêtres et les fidèles de l’Église catholique le recueillent comme une étape sur le chemin de la vérité. Je pense à leur douleur encore vive, à leur deuil encore présent, mais aussi à leur vie plus forte que la mort. Je les remercie d’avoir choisi la vie et le contraire de la haine, c’est-à-dire le pardon ou l’espérance du pardon.

Je pense aussi aux quatre personnes aujourd’hui condamnées, surtout les trois dont j’ai croisé le regard de manière de plus en plus franche. Merci à l’institution judiciaire de s’être mise au service de la vérité, au fond à leur service, à notre service. Une audience de Cour d’assises est tissée par la succession de questions. Je la quitte après plus de trois semaines avec une grande espérance et, encore, quelques questions.

JÉSUS accusé, arrêté, était dans mon cœur. JÉSUS crucifié donne à l’humanité sa véritable dignité. À côté de JÉSUS, il y a le bon Larron qui dira : « Pour nous, c’est juste … mais, lui, il n’a rien fait de mal ». Il y aussi l’autre larron enfermé dans le mal. Nous savons que le premier est entré en paradis. Il a accueilli la miséricorde, il change de chemin. Pour l’autre, nous ne savons pas. De quel côté se trouvent ceux qui sont aujourd’hui condamnés ? Nous avons entendu qu’ils choisissent le chemin du bon Larron. C’est ma prière, mon espérance nourrie par leurs paroles fortes, inattendues. La question de savoir ce que vont devenir YASSINE, FARID et STEVEN est la question la plus importante. Ils savent qu’ils doivent passer aux actes après la parole.

Le silence va suivre le verdict. Il me faudra digérer ce que j’ai entendu, le méditer. Le Mal est terrifiant. Pervertir la relation à Dieu au point de tuer en son nom m’a ébranlé et interrogé profondément. Suis-je certain que ma communauté et moi-même sommes fidèles à notre Dieu d’amour, de justice et de paix ? Cette question est ma mission. Saurais-je me mettre suffisamment en silence pour ne pas me bercer d’illusion ? Je m’y engage de manière renouvelée. J’imagine et j’espère que la communauté musulmane et ses autorités s’interrogent aussi sur cette question.

Pendant trois semaines, nous sommes descendus aux enfers. La violence, le mensonge, la lâcheté, la perversion de la foi, la misère morale, la faillite de notre société ont rempli ces semaines. Mais tout cela n’a pas de prise sur la foi véridique qui construit la fraternité, cela n’a pas de prise sur l’amour choisi par grâce et non par mérite, cela n’aura pas raison de l’exemple et du martyre du Père JACQUES HAMEL qui indiquent le chemin de la vraie vie.

Alors, quand et comment notre société quittera-t-elle ses illusions pour choisir, elle aussi, la vraie vie ? Quand et comment notre société refusera-t-elle de faire d’une pseudo-réussite économique, qui cache des pauvretés abyssales ou les engendre, ce qui éduque, ce qui fait grandir la paix, ce qui nourrit le cœur de l’homme ? YASSINE, FARID, STEVEN, et tant d’autres, ont besoin pour choisir la vie d’autres choses, ont besoin de ce que GUY COPONET, sa famille, celle du Père JACQUES HAMEL ont donné.

La justice est rendue. Elle a discerné le bien du mal autant que possible, elle a jugé et a dû condamner pour le bien de la société, pour celui des hommes présents dans le box. Reste présente à ma foi la justice de Dieu. Elle discerne à coup sûr le bien du mal et, surtout, elle poursuit le cœur de l’homme jusqu’à ce qu’il revienne au bien, jusqu’à ce qu’il revienne à sa source d’amour, jusqu’à ce qu’il revienne à Lui, Dieu, vrai Dieu, le miséricordieux.

Paris, le 9 mars 2022.

DOMINIQUE LEBRUN
Archevêque de Rouen

Déclaration téléchargeable

« Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent »

Commencent ce lundi matin, successivement et sur une durée de deux jours, les plaidoiries des parties civiles, le réquisitoire des avocates générales pour terminer par les plaidoiries de la défense.  Dans un procès, la défense a toujours le dernier mot ! Bien sûr, chacun aura à cœur, qui de chercher la réponse à ses questions, qui de défendre l’ordre public, ou ses clients en introduisant des éléments de doute, avec les talents d’orateur des uns et des autres.

Selon la définition classique et antique, la justice consiste à rendre à chacun selon son dû (suum cuique tribuere), respectant la valeur et le respect propres à chacun, en rétablissant la vérité et la raison, c’est-à-dire rétablir l’équilibre rompu par l’injustice.

La tâche est difficile, étroit est le chemin qui essaie de définir la part et le degré de responsabilités des quatre personnes impliquées dans l’attentat contre le père Jacques Hamel, surtout celle de Farid, Yassine et Steven qui sont dans le box. Il en va de la vie et de l’avenir de ces jeunes adultes. Après ces deux jours, les juges n’auront pas la tâche facile pour prononcer une sentence juste. Prions-nous l’Esprit Saint pour les avocates générales (le parquet), les avocats des parties civiles et de la défense, et surtout les juges ?

La justice est rendue pour le rétablissement de la paix. Et il y a un équilibre à tenir entre charité et vérité : la charité commence déjà par la vérité, à l’inverse la vérité sans charité peut être inhumaine. Rappelons-nous la belle encyclique Caritas in veritate (La charité dans la vérité) du pape Benoît XVI.

Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent
La vérité germera de la terre et du ciel se penchera la justice (Ps 84).

+Père Paul Vigouroux, le 7 mars 2022.

Prière universelle des samedi 26 et dimanche 27 février 2022

Seigneur, pour tes serviteurs qui glorifient ton Nom, pour tous les frères et sœurs en Christ détenus, persécutés, qui vivent leur foi dans la clandestinité : viens leur en aide, afin qu’ils gardent la force dans les épreuves et dans la fidélité à l’Évangile,

Seigneur, des chrétiens fuient leur pays en raison des persécutions religieuses et ethniques ; ouvre le cœur des dirigeants et des persécuteurs afin qu’ils soient transformés par ton Amour et ta miséricorde, qu’ils respectent la foi et qu’ils prennent en compte le désir de paix de chacun,

Seigneur, accorde à toutes celles et ceux qui œuvrent inlassablement pour l’entente entre les peuples et le mieux-vivre ensemble : que la lumière de ta Parole les éclaire pour bâtir une fraternité humaine universelle,

L’attentat de Saint-Étienne-du-Rouvray a bouleversé les croyants et les non-croyants partout dans le monde. Que la vie et la mort du père Jacques Hamel, serviteur humble et généreux, continue de résonner en notre temps pour que le mal n’ait jamais le dernier mot.

Billets Spirituels

Comprendre

Cette troisième semaine, au procès des personnes impliquées dans l’attentat contre le père Jacques Hamel, se poursuit l’audition de témoins présentés par la défense : amis, famille mais aussi médecins.

Entendre ce que chacun a à dire sur les personnes mises en cause : leur histoire personnelle et familiale, leur enfance peut-être douloureuse, leurs fréquentations, les lieux où ils ont grandi, les échecs scolaires, etc. ; Connaître les raisons idéologiques ou religieuses, voire politiques, qui ont conduit à commettre un attentat ; Comprendre ce qui a pu mener à d’éventuelles complicités, ainsi que les processus de radicalisation. En espérant une prise de conscience de ces personnes impliquées, un changement voire une conversion.

Nous le savons bien, et Jacques Hamel l’avait dit dans une homélie en 2010 : « Si Dieu condamne le mal, il ne rejette pas le pécheur, celui qui a commis le mal ». D’’ailleurs, lui-même avait prononcé ce « Va-t’en, Satan » au moment de l‘attentat, nommant le Mal et le dissociant de celui qui en était l’instrument.

Ces auditions sont peut-être aussi une opportunité de prendre conscience de ce qui, de notre côté, n’a pas été fait, tant individuellement que collectivement. Que n’avons-nous pas fait ? Quelles sont les structures de péché qu’il nous faut éradiquer ? Quelles attitudes nous faut-il changer ?

Et alors, elles pourraient résonner pour nous aussi comme un appel à la conversion.

 

+ Père Paul Vigouroux, le 28 février 2022.

« Tuer au nom de Dieu est satanique »

Ces trois derniers jours de la troisième semaine du procès, ont lieu les interrogatoires des trois personnes impliquées dans l’attentat le 26 juillet 2016 contre le Père Jacques Hamel. Une journée complète est consacrée à chacun d’eux par la Cour d’Assises spéciale de la République, qui examinera aussi maintenant leurs motivations religieuses.

La religion, cause de haine et de guerre ? Nous connaissons bien en France cette accusation souvent faite aux religions, un monde sans religion souvent perçu comme plus pacifique, puisqu’une occasion supplémentaire de se faire la guerre aurait disparue.

Quelques jours avant la rencontre interreligieuse d’Assise en octobre 2016, donc peu de temps après la mort de notre frère prêtre, le pape François avait lancé dans une homélie à la chapelle de la maison Ste Marthe au Vatican : « Comme il serait beau si toutes les confessions religieuses disaient ‘’Tuer au nom de Dieu est satanique’’ ! ». Devant des pèlerins de notre diocèse, et en particulier notre archevêque et la famille du Père Jacques, il avait répété dans cette même homélie cette phrase une seconde fois : « Tuer au nom de Dieu est satanique ! », avant de s’arrêter longuement sur le martyre, celui du Christ, « premier martyr », celui des premiers chrétiens qui offraient leur vie en refusant d’apostasier, ajoutant le frère Jacques à cette « chaîne des martyrs ».

En 2013, il avait déjà affirmé qu’« utiliser le nom de Dieu pour justifier la violence et la haine est un blasphème ».

La religion, selon une étymologie possible, est ce qui relie Dieu et les hommes, les hommes entre eux. D’ailleurs, la croix de Jésus en est une parfaite illustration, avec ses deux poutres en bois, verticale et horizontale. Sans aller jusqu’à tuer, nous sommes peut-être parfois tentés d’utiliser la religion pour nous séparer des autres.

Le carême 2022 vient de commencer, profitons-en pour nous réajuster à un juste rapport à la religion.

+ Père Paul Vigouroux, le 3 mars 2022

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Prière universelle des samedi 19 et dimanche 20 février 2022

Pour les prêtres renonçant à eux même pour Te suivre, ils sont parmi nous signes du Christ Pasteur : Qu’ils soient pleins de douceur, enracinés dans la prière au service du peuple de Dieu.

Pour les séminaristes : que les prêtres aînés soient pour eux signe, que la vie donnée à l’annonce de l’Évangile et du mystère eucharistique dans la fidélité à Ton Nom soit source de vie, de paix et de joie.

Seigneur envoie ton Esprit saint sur ton peuple, que chacun découvre quelle est sa vocation pour Te suivre sur ce chemin de bonheur et de liberté que tu veux pour chacun et chacune. Avec Marie ta mère soutiens nos oui;

Pour Mgr Lebrun, pour les prêtres, pour les fidèles qui suivent le procès, pour toutes les communautés religieuses, les consacré(e)s qui désirent à travers le monde honorer un Dieu d’amour et de miséricorde.

Depuis une semaine se déroule le procès qui coûtât la vie à ton serviteur le Père Jacques Hamel ; Pour toutes les personnes qui témoigneront : donne-leur ton Esprit de sagesse, d’équité, de conseil et de force. Que les débats se déroulent avec un esprit de miséricorde pour qu’en recherchant la justice, nous communions à ton amour pour les hommes.

Pour notre communauté, Seigneur visite nos cœurs, que nous sachions être des artisans de réconciliation et de paix dans nos lieux de vie, de quartiers, de travail. Que nous soyons signe que le vivre ensemble est possible dans nos différences pour que de tels actes ne se reproduisent pas.

Billets Spirituels

Peut-on préférer les ténèbres à la lumière ?

La première semaine d’audience à Paris s’est terminée jeudi par l’audition par la Cour d’un jeune religieux dominicain, islamologue, en poste au Caire. Ce témoignage a été suivi vendredi par un exposé sur le contexte géopolitique et sur les actions inspirées et commanditées par l’État Islamique, puis par une présentation générale de l’enquête sur l’assassinat du père Jacques Hamel.

Durant ces deux prochains jours, la Cour s’intéressera au rôle des personnes impliquées de près ou de loin dans cet assassinat.

« Peut-on préférer les ténèbres à la lumière ? » interrogeait notre frère prêtre, dans un éditorial de la feuille paroissiale de Saint-Étienne-du-Rouvray en l’an 2000. Et il poursuivait : « Non, sans doute. Mais quand nous commençons à fermer les yeux pour ne pas voir le mal du monde et sa souffrance, c’est déjà la nuit qui s’installe. C’est vrai que c’est dur de regarder. Mais à force de fermer les yeux, on ferme son cœur. Alors il n’y a plus de place pour Dieu, pour une parole de salut ».

C’est vrai que c’est dur de regarder. C’est dur aujourd’hui de regarder le mal qui a été commis au nom de l’État Islamique. C’est dur pour les proches du défunt prêtre, c’est dur pour notre diocèse, c’est dur pour notre pays de regarder ce mal là. Mais sans doute est-ce nécessaire, tant pour comprendre ce qui s’est passé, pour continuer le travail de guérison dans les cœurs blessés que pour prévenir d’autres actes de terrorisme. Sans doute est-ce nécessaire aussi pour que notre cœur ne se ferme pas.

C’est vrai que c’est dur aussi de regarder la croix, devant cette insoutenable souffrance d’un homme à l’agonie. Mesurons-nous pleinement ce qu’elle est ? Dans un regard de foi, avec l’Évangile au cœur, osons aujourd’hui regarder la croix plantée dans le monde pour y voir le Christ qui étend les bras pour embrasser toute l’humanité. C’est le don de Dieu et son amour.

Le père Jacques Hamel avait écrit que « ce regard de Foi nous sauvera. Il nous sauvera de cette impression qu’il n’y a rien à faire, que le monde est ainsi fait. Nous verrons que Dieu ne se résigne jamais au monde du péché ».

« Grâce au Christ, avait-il dit dans une prédication en février 2001, il n’est jamais rien d’irrémédiableil y a toujours quelque chose de possible ».

+Père Paul Vigouroux, le 21 février 2022.

Nous élever à la hauteur de l’amour de Dieu

Les premiers jours du procès ont été très éprouvants : Voir le visage et croiser le regard des trois hommes dans le box des accusés a suscité de fortes émotions ; Entendre le déroulement précis et méthodique de l’attentat par un officier de police et voir des images insoutenables du Père Hamel mort couché par terre dans son sang a ravivé de nombreuses plaies. Ces moments ont vraiment été très éprouvants pour les parties civiles et l’ensemble des participants à ce procès.

C’est la raison pour laquelle notre archevêque a souhaité que soit projetée, lors de son audition jeudi dernier, la photo de notre frère prêtre signée par le pape François lors du pèlerinage à Rome de quelques diocésains, dont Roseline, sœur du père Jacques, en septembre 2016, quelques semaines après l’attentat. C’est, expliquait Mgr Dominique Lebrun, ce souvenir-là du Père Jacques Hamel que nous voulons garder !

Ce temps du procès est aussi le lieu où résonne publiquement, au sein de la Cour d’Assises spéciale de la République, la réponse chrétienne à la violence, en particulier à la violence d’un fanatisme religieux.

Le Père Jacques Hamel se sentait proche de quelques figures de sainteté. Il aimait bien St François d’Assise, à qui l’on attribue cette belle prière :

Seigneur, fais de moi un instrument de ta paix,
Là où est la haine, que je mette l’amour.
Là où est l’offense, que je mette le pardon.
Là où est la discorde, que je mette l’union.
Là où est l’erreur, que je mette la vérité.

Là où est le doute, que je mette la foi.
Là où est le désespoir, que je mette l’espérance.
Là où sont les ténèbres, que je mette la lumière.
Là où est la tristesse, que je mette la joie.

Ô Seigneur, que je ne cherche pas tant à être consolé qu’à consoler,
à être compris qu’à comprendre,
à être aimé qu’à aimer.

Car c’est en se donnant qu’on reçoit,
c’est en s’oubliant qu’on se retrouve,
c’est en pardonnant qu’on est pardonné,
c’est en mourant qu’on ressuscite à l’éternelle vie.

En 2012, lors des fêtes de Pâques, le Père Jacques Hamel disait à ses paroissiens : « Croire en Jésus, c’est venir sans peur à la lumière. N’ayons pas peur de lever nos yeux vers Jésus le crucifié, mais en même temps et surtout le Ressuscité. C’est lui qui peut nous élever à la hauteur de l’amour de Dieu ».

 

+ Père Paul Vigouroux, le 24 février 2022.

 

Intention de prière pour les messes des samedi 12 février et dimanche 13 février 2022

Seigneur, ce lundi 14 février s’ouvre le procès de l’attentat de Saint-Étienne-du-Rouvray qui coûta, le 26 juillet 2016, la vie à ton serviteur le Père JACQUES HAMEL.

Nous te prions pour le déroulement serein du procès, pour la mission des juges, des avocats, du Procureur de la République, pour les victimes et leurs familles, les témoins et les accusés.
Nous te confions particulièrement ce dimanche les paroissiens de Saint-Étienne-du-Rouvray et les habitants de cette commune pour qui ce procès ouvre à nouveau les plaies d’un profond traumatisme.

Accorde à la communauté blessée d’avancer sur le chemin du pardon. Renouvelle cette paroisse dans la foi, l’espérance et la charité. Qu’elle n’ait de cesse d’être artisan de paix auprès des personnes de toutes langues, peuples et nations qu’elle côtoie et rencontre. Qu’elle témoigne en toute circonstance du Christ vainqueur du mal. Que le sacrifice du Père JACQUES HAMEL, le don de sa vie par amour pour Toi, ouvre le monde à la conversion des cœurs pour vivre en frères et sœurs bien aimés d’un même Père.

Billets Spirituels

Justice de Dieu, Justice des hommes

Aujourd’hui s’ouvre à Paris le procès des personnes impliquées dans l’assassinat du Père Jacques Hamel, un procès qui devrait durer au moins quatre semaines.

St Paul écrivait aux Romains : « Ne rendez à personne le mal pour le mal ; Ayez à cœur de faire le bien devant tous les hommes. Car il est écrit : À moi la vengeance, c’est moi qui rétribuerai, dit le Seigneur. Mais si ton ennemi a faim, donne-lui à manger, s’il a soif, donne-lui à boire. Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais sois vainqueur du mal par le bien ».

D’un côté, il y a la justice de Dieu, dont nous savons qu’elle est toujours appel à la conversion, la « vengeance de Dieu », laquelle ne nous appartient pas. C’est un peu celle que nous essayons de vivre quand nous tendons la seconde joue après que la première a été frappée ; quand nous tendons la main du pardon et de la réconciliation ; quand l’Évangile convertit la haine de notre cœur ; quand nous sommes vainqueurs du mal par le bien. Peut-être que la vengeance de Dieu, c’est l’amour en réponse à la haine ! C’est l’amour qui va jusqu’au bout, c’est le Christ qui livre sa vie pour les pécheurs que nous sommes afin de nous rendre justes.

Aujourd’hui, à Paris, s’ouvre le temps de la justice des hommes. Non pas tant pour se venger ou condamner, mais en vue de définir les responsabilités des uns et des autres dans la mort du Père Hamel. Les quatre personnes dans le box des accusés ont le droit de savoir ce que la société leur reproche ; les familles des victimes ont elles aussi le droit de savoir qui est responsable de quoi dans cet acte de terreur commis le 26 juillet 2016.

Notre prière de ce jour, c’est que cela se fasse en vue de la conversion des cœurs et d’un appel à une vie en société fondée sur une plus grande fraternité. C’est que, de ce Mal, jaillisse un bien plus grand.

+Père Paul Vigouroux, le 14 février 2022.

Rencontre de Dieu, rencontres humaines

C’est dans la salle Voltaire du Palais de Justice de Paris, sur l’île de la Cité, que se tient depuis lundi le procès des quatre personnes impliquées dans l’assassinat du père Jacques Hamel.

Aujourd’hui ont été auditionnés la famille, les amis et paroissiens du prêtre assassiné.

Dans cette salle Voltaire – Petit clin d’œil de l’histoire ! – une des plus hautes instances de la République – une Cour d’Assises spéciale – entend un beau témoignage sur un prêtre catholique et son humble ministère paroissial.

Jacques Hamel aimait l’Église, qu’il voulait servir jusqu’au bout ; il essayait d’aimer les gens, tous les gens sans exception, manifestant dans son ministère et sa vie humble la tendresse de Dieu pour tout homme.

Quelques jours avant sa mort, le père Hamel avait dit à ses paroissiens dans son homélie dominicale : « La meilleure part, c’est donc la rencontre. La meilleure part avec Jésus, c’est de le rencontrer, lui, et de se laisser rencontrer par lui » (17 juillet 2016). Et il aimait penser que « Dieu offre sa présence non seulement dans les lieux liturgiques, mais dans toute rencontre où les yeux s’ouvrent pour reconnaître en l’autre un frère, une sœur » (26 octobre 2003) et que « toute rencontre humaine est un rendez-vous avec Dieu » (2005).

Il avait bien conscience que « Ceux qui vivent avec toi, ceux que tu rencontres et que tu n’as pas forcément choisis, Dieu les aime aussi » (5 novembre 2001).

Le bonheur, notre joie, ne se trouve pas d’abord dans le fait de posséder ce que nous aimons ou de vivre avec ceux que nous aimons, mais plutôt d’aimer ce que nous avons et d’aimer ceux avec qui il nous est donné de vivre.

+Père Paul Vigouroux, le 17 février 2022

Homélie du Père Jacques SIMON

 

Fête de Notre-Dame de Lourdes – Vendredi 11 février 2022 à l’église de Saint-Étienne-du-Rouvray

La Vierge Marie est la femme des commencements. La nouvelle Ève.

Car, c’est par elle que tout a commencé quand elle a répondu à l’ange Gabriel : « Qu’il me soit fait selon ta parole ». Sinon, nous ne serions pas ici ce soir.

Le « oui » de Marie à l’Annonciation ouvrait la porte pour que le plan de l’amour de Dieu pour le salut des hommes puisse s’accomplir, au milieu des hommes et avec la participation des hommes.

Le « oui » de Marie est l’acquiescement, l’adhésion de l’humanité au projet de salut de Dieu.

Le « oui » de Marie à Dieu symbolise la part de l’humanité la plus disposée, la plus préparée, la plus ouverte à accueillir le salut de Dieu pour les hommes. Communautés paroissiales de St-Étienne et de Oissel, membres des communautés chrétiennes du diocèse de Rouen présents ce soir, sommes-nous cette part d’humanité ?

Dans son Évangile, saint Jean nous présente Marie qui est là dès le début du mariage comme au commencement. L’évangéliste nous dit : « Tel fut le commencement des signes que Jésus accomplit. C’était à Cana en Galilée. Il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en Lui ».

Marie rend possible le commencement de la fête en faisant remarquer que les convives n’ont pas de vin. Elle est animée par sa foi, par la conviction profonde qui l’habite que Jésus est là pour faire quelque chose, faire quelque chose pour les hommes qui se trouvent là, participant aux noces de Cana. Marie est convaincue, même si elle entend son fils lui dire « Que son heure n’est pas venue », qu’il fera ce qui doit être fait, même si elle ignore ce qu’il fera. De la même manière qu’elle a répondu à l’ange, « que tout se passe pour moi selon ta parole », elle dit aux serviteurs : « Faites tout ce qu’Il vous dira ». C’est ainsi entrer dans la confiance en Dieu.

Les serviteurs sont peut-être pris par l’affolement d’une intendance ratée. S’ils exécutent au départ une consigne, la suite montre qu’ils entrent aussi dans un chemin de confiance. Ils remplissent les cuves d’eau et participent au projet de Dieu sans tout comprendre.

C’est à eux que Marie dit : « Faites tout ce qu’Il vous dira ». Mais c’est aussi à nous et à l’humanité tout entière que cette invitation de Marie, « Faites tout ce qu’Il vous dira », s’adresse.

Oui, Marie est la femme du commencement, la femme de l’origine, la femme où tout est permis de croire et d’espérer. Où l’impossible devient possible.

Elle sera au milieu des apôtres le jour de la Pentecôte, au commencement de l’Église.  L’Église qui n’est plus simplement là pour remplir les jarres d’eau, mais pour donner la vie du Christ, « prenez et mangez, prenez et buvez le vin, ceci est mon sang versé ».

Marie continue d’être là aujourd’hui au milieu de nous, au milieu de son Église, pour nous faire rendre attentifs à ceux et celles qui manquent de tout, d’amour, de confiance en eux, de foi et d’espérance. Elle continue de nous dire : « Faites tout ce que mon Fils vous dit ».

C’est ainsi qu’il y a plus de 160 ans, dans une cavité proche de ce village des Pyrénées qu’était Lourdes, Marie est venue dire à une jeune fille, Bernadette, qui avait le même âge qu’elle quand l’ange était venu la visiter, « Voulez-vous avoir la grâce de venir ici pendant quinze jours ? »

Marie voyait-elle l’humanité du XIXème, marquée par ses guerres, ses empires, la misère, les maladies, les pandémies, l’esclavage et la souffrance des pays colonisés, manquer de tout ? Que pouvait-elle montrer de plus qu’à Cana du haut de cette grotte dite « aux cochons » ? Si ce n’était de montrer à nouveau le signe qui allait permettre aux hommes et aux femmes d’aujourd’hui de réfléchir sur le sens de leur vie et de leur foi. Marie demandait à Bernadette, qui ne comprenait pas pour autant, de creuser dans une terre boueuse et sale. Elle montrait à nouveau qui était cette source jaillissante de cette grotte de Massabielle, le Christ Seigneur.

Marie catéchisait Bernadette pour qu’elle-même devienne apôtre, à la suite de la samaritaine, « il m’a dit tout ce que j’ai fait », à la suite des femmes le matin de Pâques, « allez dire à vos frères que je les attends en Galilée ». Bernadette qui répondait à ses accusateurs, ceux qui refusaient le signe de Lourdes, « je ne suis pas chargée de vous le faire croire, je suis chargée de vous le dire ».

Quel signe recevons-nous de Dieu par Marie, précisément dans notre Église de St-Étienne, en cette fête de Notre-Dame de Lourdes, où notre prière se fait plus pressante, à l’approche du procès de l’attentat, dans cette église qui coûta la vie au père Jacques Hamel ?

Quel témoignage allons-nous porter ?

Un appel à la pénitence ? Une invitation à demander pardon ou à donner son pardon ?  En aucun cas, un message de rancœur, de tristesse, malgré la colère, l’insoutenable, l’incompréhensible, l’injustice qui s’est vécue ici, il y a bientôt six ans. De quel signe d’amour allons-nous témoigner au milieu de nos questions, de notre souffrance, des plaies qui s’ouvrent à nouveau, du poids de notre culpabilité ?

L’eau sera-t-elle changée en vin ?

Demandons à Marie, qui nous dit « faites tout ce qu’Il vous dira », d’être ce signe de l’amour de Jésus, de paix, de sérénité, pendant ces semaines qui s’ouvrent avec le procès.

Quel signe ?  Si ce n’est le don de soi. « J’irai jusqu’au bout » disait votre pasteur le père Hamel.

 Il a communié dans sa mort à « l’heure de Jésus ».

« Ma vie, nul ne la prend. C’est moi qui la donne. »

« Ceci est mon sang versé. »

Alors, « Heureux les invités au repas des noces de Cana » !

Découvrir le Père Jacques HAMEL par des livres:

LIVRE 5

Collection Prier 15 jours, Edit. Nouvelle Cité, août 2019, 128 pages

Prêtre du diocèse de Rouen, le père Paul Vigouroux est le postulateur de la cause de béatification du père Jacques Hamel.

livre 2

préface de Mgr Dominique Lebrun, Edit. Bayard, janv 2019, 130 pages

Roseline Hamel est la petite soeur du père Jacques Hamel : dix années les séparaient, mais rarement le lien fraternel aura été aussi fort. Projetée par le drame dans la lumière des médias, Roseline Hamel a senti qu’elle devait prendre la parole, dire qui était son frère dont la vie aura été donnée à Dieu et aux hommes.

LIVRE 3

Edit. Artège, juin 2018, 172 pages

Auteur, éditeur, réalisateur de plus de 100 documentaires pour la télévision, Armand Isnard se consacre désormais à la réalisation de portraits fouillés de grandes figures profanes ou religieuses qui ont marqué notre temps.

LIVRE 4

préface de Mgr Dominique Lebrun, Edit Bayard, juin 2017, 144 pages

Ce livre, rédigé sous forme de lettres librement adressées au père Hamel, est une puissante méditation sur la violence, le terrorisme, la religion. Dans une langue brûlante, poétique, l’auteur évoque le martyr du prêtre, la folie de ses assassins, et ce qu’éprouve un musulman comme lui.

livre

préface de Andrea Riccardi, Edit. du Cerf, sept 2016, 127 pages

Historien, titulaire de la chaire Cusanus  » Religion, conflit et paix  » à l’université catholique de Louvain, Jan De Volder compte parmi les experts reconnus du fait religieux contemporain.