A Philémon, réflexions sur la liberté chrétienne d’Adrien Candiard


A Philémon
réflexions sur la liberté chrétienne
d’Adrien Candiard

Adrien Candiard est un Dominicain, vivant au Couvent du Caire. Il relit la manière d’être chrétien aujourd’hui comme dans ces précédents ouvrages. Il aborde dans « A Philémon, réflexions sur la liberté chrétienne », publié aux éditions du Cerf, en 2019, la question de la liberté pour le fidèle du Christ, comme son sous-titre l’indique.
La lecture de ce court opuscule de 144 pages pourrait être une belle méditation pour le temps qui est le nôtre et nous préparer à célébrer Pâques.

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2021-01 – Saint-Pierre Yvetot : A Philémon, réflexions sur la liberté chrétienne d’Adrien Candiard.

 

 

 

Bien connu du grand public, le nom de Candiard ne vous est probablement pas étranger. Dominicain et spécialiste de l’Islam, il est auteur de nombreux essais parmi lesquels Pierre et Mohamed (2018), Comprendre l’islam ou plutôt pourquoi on n’y comprend rien (2016), et plus récemment, Du fanatisme : quand la religion est malade (2020). Très bon pédagogue, réputé pour sa bonne plume et ses essais concis, c’est avec beaucoup d’aisance qu’il sait nous faire profiter de sa réflexion, percutante et pleine de bon sens, sur des sujets variés et parfois sensibles.

À Philémon (2019) est un essai sur le sens de la liberté chrétienne. Il s’ouvre avec en exergue une citation de la deuxième lettre aux Corinthiens : « Là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté » (2Co 3,17), qui donne et résume parfaitement la thèse développée dans ce livre. Elle fait écho à la révolution morale libératrice opérée par le christianisme. En effet, en régime chrétien il ne s’agit pas tant d’obéir formellement à une loi donnée que d’arrimer cette obéissance dans une amitié au Christ c’est-à-dire dans une vie spirituelle qui engage toute notre personne. Au fond, Adrien Candiard cherche à montrer que pour les chrétiens, la liberté, ce n’est pas tant se plier aux injonctions de la lettre que d’être à l’écoute de l’Esprit. La réflexion se déploie au long de ces quelques pages, ancrée sur une méditation de plusieurs passages de l’Évangile. Elle est enrichie d’exemples simples, d’anecdotes concrètes et délicieusement contées.

L’opuscule revisite d’abord la conversion de Saint Paul. Racontée sans détours, elle nous est donnée à voir comme une véritable libération à l’égard des formalismes imposés par la loi mosaïque. Le premier chapitre donne la clé qui permet de comprendre l’ensemble de l’épître à Philémon et par suite, le sens nouveau de la liberté qui nous est offert par le Christ. Ainsi, c’est la conversion de Paul qui nous permet de comprendre pourquoi l’apôtre n’ordonne pas à Philémon d’affranchir l’esclave Onésime venu se réfugier auprès de lui. Paul se tient au seuil de la conscience de Philémon : il ne désire l’asservir à aucune loi, par où il suscite la liberté de sa conscience. Le seul critère auquel Paul fait appel, c’est celui de la charité. Paul invite Philémon à faire le bien, librement, sans lui imposer une quelconque contrainte, car lui, il sait que ce qui est en jeu, c’est moins la libération d’Onésime que celle de Philémon. L’objectif de Paul, n’est pas de prendre parti politiquement pour ou contre l’esclavage : son projet c’est de faire profiter Philémon de l’expérience dont il a lui-même bénéficié lors de sa conversion. Et c’est là le motif véritable de son épître : permettre à son ami Philémon de faire l’expérience de sa propre liberté, qui n’est pas d’abord obéissance à une règle, à une consigne, à un impératif mais vie avec le Christ. C’est à l’aune de cette amitié au Christ que Paul invite Philémon à considérer la situation de son esclave Onésime, à voir en lui « un frère ».

La chose paraît facile, teintée de relativisme voir de nihilisme : il n’y aurait ainsi ni bien ni mal, il suffirait d’aimer. Paul nous autoriserait-il donc à faire ce que l’on veut, comme on veut, quand on veut ? Mais est-ce pour autant qu’il faut rejeter toute morale ? Les questions sont légitimes et dans la suite de l’essai, l’auteur s’attache à nous donner les moyens d’y répondre. S’il est une chose dont nous pouvons être certains c’est que la charité est le critère ultime de toute morale. En quoi toute morale, doit toujours être précédée d’une vie spirituelle : l’amour ressaisit toute chose et il ne peut y avoir de véritable recherche du bien que dans une liberté aimante. Et là où l’on pouvait croire qu’il n’y avait plus d’exigence morale, parce qu’il n’y avait plus de loi, cette dernière s’en trouve, loin s’en faut, renouvelée, élargie et même rehaussée par la charité. Car c’est dans la charité que la liberté est véritablement regagnée, et vivre dans la charité n’est pas plus facile que d’obéir à une liste de prescription.
Bref, ce que Paul nous donne à comprendre dans l’épître à Philémon, c’est la liberté dans son exigence la plus propre, exigence que l’on peut ainsi résumer : « « Tout est permis », mais tout n’est pas constructif » (1Co 10,23).

C’est donc avec brio et dans un vocabulaire accessible que Candiard, dans un optimisme lucide, expose à frais nouveaux le sens de la morale chrétienne ; morale qui n’est plus amour de la Loi mais loi de l’Amour. De bonne facture, À Philémon est facile d’accès et se laisse aisément lire. Que cet ouvrage permette à beaucoup de lecteurs de se laisser renouveler dans leur compréhension de la liberté chrétienne !