Lettre aux fidèles de la paroisse – Abbé Benoît Bréant, curé

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Lettre aux fidèles de la paroisse

 

 

1. Une période inédite

Depuis plus de sept semaines maintenant, nous sommes entrés dans ce qu’il est convenu d’appeler une période de confinement.
Dans les premiers temps, nous avons pu penser que ce serait l’affaire de quelques jours, quelques semaines, au pire. Nous avons accueilli ce temps comme une pause.
Certes, il nous fallait rester à la maison mais nous pensions que ce serait bref. Les magasins en ville fermés, l’école à la maison, le télétravail… il a fallu, avec les jours qui passaient, nous adapter.

Depuis sept semaines maintenant, hormis pour quelques minutes par jour, pour un temps d’oxygénation, pour quelques courses essentielles, notre horizon s’est réduit à notre maison, notre appartement. Les plus chanceux peuvent profiter de leur jardin.
Nos relations sociales se sont limitées à ceux qui habitent le même espace que nous. Grâce aux moyens de communication modernes, nous avons pu quelquefois entretenir ce lien avec nos enfants, nos petits-enfants, nos amis. L’AFC locale a mis en place un rendez-vous hebdomadaire d’échanges téléphoniques.

Le rassemblement dominical, où il nous était agréable de nous retrouver, a disparu également. Quelques-uns trouvent dans le feuillet hebdomadaire envoyé par la paroisse une aide pour prier le dimanche, en communion avec la communauté habituelle.
D’autres ont pris rendez-vous avec les retransmissions télévisées ou internet.
Si les messes publiques, dominicales et en semaine, sont impossibles, c’est aussi toute la vie cultuelle qui s’est arrêtée : mariages, baptêmes célébrés, sacrement de réconciliation ou des malades mis entre parenthèses, premières communions, professions de foi ou confirmations reprogrammées.
Les funérailles sont aussi fortement impactées. Le nombre réduit par les dispositions gouvernementales à 20 personnes nous ont conduits à ne célébrer que dans l’église d’Yvetot, sans animateur pour les chants, sans organiste. Nous avons, je le crois, fait ce qui nous a semblé le mieux pour que la prière soit possible au moment de la mort d’un proche. Nous avons donc permis aux uns et aux autres de vivre ce temps de la séparation avec un peu de sérénité. Plusieurs témoignages nous le disent.

Cette période a pu être profitable pour quelques-uns d’entre nous. Nous avons découvert de nouvelles relations avec nos voisins. Nous avons eu l’occasion de leur rendre quelques menus services pour leur permettre de ne pas s’exposer à la contamination virale. Depuis longtemps, nous n’avions pas eu l’occasion de partager du temps en famille, avec notre conjoint, nos enfants. Même les congés annuels n’en sont pas toujours l’opportunité. La prière familiale, conjugale a pu trouver une place inhabituelle dans notre rythme quotidien.
Nous avons pu réfléchir sur nos priorités personnelles, familiales.

Cette période est aussi une source d’inquiétudes pour un grand nombre également.
Elles existent bien sûr chez ceux qui malgré les risques encourus continuent d’exercer leurs professions. Nous pensons au milieu médical, aux services à la personne. N’oublions pas ceux qui sont moins visibles mais également toujours au travail pour notre bien à tous (facteurs, éboueurs…)
Elles existent chez ceux qui réfléchissent aux “jours d’après”. Comment vivrons-nous demain, quelles habitudes changeront, adapterons-nous ? Quelles conséquences sociales, économiques… de cette période ? Il ne m’appartient pas de répondre à ces interrogations.
Plus le temps passe, plus ces inquiétudes montent chez ceux qui sont le plus impactés financièrement pas la mise en quarantaine de l’activité économique. Nous pensons à nos commerçants de proximité qui luttent de manière encore plus déséquilibrée en ces temps, face aux géants de la grande distribution, concurrencés également par les ventes par internet.
Les possibilités à nouveau offertes à partir du 11 mai ne laissent pas sans questionnement concernant une réactivation du virus.
On entend également les difficultés des maires à gérer la réouverture des écoles, incluant les services de cantine, les transports scolaires…
On peut se réjouir que les marchés soient à nouveau possibles mais aurons-nous le souci de respecter les gestes de distanciation sociale ? Si un masque, une visière peuvent être des remparts, ils ne font pas tout…

2. Quelques perspectives
Comme beaucoup d’entre vous, j’ai entendu monsieur le Premier Ministre devant l’Assemblée Nationale rappeler que les dispositions concernant le culte public demeureraient jusqu’au 2 juin prochain. Lundi 5 mai, devant le Sénat, monsieur Philippe a avancé la possibilité du 29 mai, ce qui nous permettrait d’inscrire la fête de Pentecôte.
Ma déception, comme la vôtre peut-être, a été à la hauteur des attentes qui étaient les miennes. J’espérais beaucoup un retour, certes pas à la normale le 11 mai, mais au moins une ouverture qui aurait pu ressembler aux rassemblements familiaux ou au retour en classe des élèves.
Le peu de place dans le discours devant les députés – a contrario de celui devant les sénateurs- ne fait que nous rappeler – avec douleur sûrement- que le domaine de la foi et de son expression à travers les rassemblements dominicaux est loin d’être une priorité de nos contemporains.
D’ailleurs, interrogeons-nous en vérité. Quelle place pour la messe chaque semaine, si elle est en concurrence avec un rendez-vous amical, familial, sportif ? Quelle est ma réaction si la messe prend une forme un peu différente lorsque sont accueillis des enfants pour leur première communion, profession de foi… et qu’elle dure un peu plus longtemps ?
La règle monastique de saint Benoît au § 43 traite du retard à l’office comme d’une incapacité à ordonner sa vie à l’œuvre de Dieu. Rien ne doit empêcher le moine d’être au rendez-vous du Seigneur. Ce paragraphe traite également du retard au repas. Rien n’est plus important que les frères qui m’attendent…

J’avais signé la proposition des prêtres en soutien à nos évêques, envoyée au Premier Ministre.
Il existe une dimension essentielle à notre vie avec le Christ qui ne peut faire l’économie de nos rassemblements dominicaux. La Parole de Dieu est notre nourriture. Elle nous donne de découvrir la volonté de Dieu, de mieux connaître le Christ pour l’imiter chaque jour davantage. Toutefois, si nous n’avons pas “besoin” d’église pour prier, c’est l’eucharistie qui construit le Corps du Christ, qui nous permet de recevoir une force qui nous aide à dépasser nos propres faiblesses, découragements…
J’espère secrètement que cette période nous aura permis de (re)découvrir cela. Que la permission nous ait été donnée pour le 17 mai, ou qu’elle le soit pour le 31 mai ou le 7 juin n’y change rien.

Il nous faudra accepter également, quand l’ouverture du culte public sera à nouveau autorisée, quelques adaptations. Avec l’équipe de réflexion pastorale, composée d’hommes et de femmes d’Yvetot, mais aussi des villages, de ministres ordonnés ou de laïcs, impliqués dans la vie pastorale, nous réfléchissons à ce qui pourrait être mis en place pour le bien de chacun.

A. Célébrations des sacrements :
Messes dominicales et en semaine : dès que l’autorisation nous sera donnée, nous vous accueillerons volontiers. Il nous est difficile pour le moment d’envisager une reprise des messes dans les villages. Nous proposerions trois messes à Yvetot par week-end, en espérant que vous serez attentifs à vous répartir et sur ces horaires et dans l’église, en fonction des consignes qui nous seront indiquées. En semaine, nous célébrerons dans l’église et non la chapelle. Il sera conseillé à chaque messe de se munir de masques (sauf pour les petits enfants). Il sera sûrement utile qu’avant de venir communier, chacun ait pu se passer les mains au gel hydroalcoolique qu’il aura apporté.
Nous poursuivrons quelques temps l’envoi du feuillet hebdomadaire, en comptant sur ceux qui le reçoivent pour le diffuser à leurs contacts mais aussi leurs voisins qui ne possèdent pas internet.
A partir du 11 mai, pourquoi ne pas inviter vos voisins, dans la limite d’un rassemblement familial, pour prier ensemble.
Le pape François, en ce mois de mai, nous conseille la méditation du chapelet, idée reprise par notre évêque dans sa dernière lettre aux fidèles.
Confessions : à partir du 11 mai, il sera possible de demander à recevoir le pardon de Dieu. Toutefois, les prêtres ne recevront que sur rendez-vous. Le but est une fois encore de ne pas provoquer de rassemblement. N’hésitez donc pas à nous solliciter. Dès que les célébrations publiques reprendront, nous proposerons à nouveau des permanences.
Il pourrait être bien d’inscrire ce rendez-vous avec Dieu avant de communier à nouveau…
Sacrement des malades : dès le 11 mai, nous pourrions imaginer répondre à cette sollicitation avec le respect des gestes barrières qui nous sont imposés.
Funérailles : il nous faudra sûrement prolonger encore quelques temps les dispositions mises en place. J’espère que nous serons autorisés à augmenter le nombre de participants à la prière communautaire. L’église d’Yvetot nous semble la plus appropriée quel que soit le nombre de personnes autorisées. La bénédiction et le rite de la lumière seraient réservés aux célébrants. Nous pourrons par contre imaginer la préparation en présence de deux membres de chaque famille. Organistes et chantres seront à nouveau sollicités, dans la mesure de leurs disponibilités.
Baptêmes et mariages : nous avons accueilli beaucoup de demandes de report de dates. Nous allons essayer d’y répondre le mieux possible. Nous voulons redire aux uns et aux autres notre impatience d’offrir la grâce des sacrements de mariage et de baptême, si essentiels pour nous aider à vivre comme disciples de Jésus Ressuscité. Nous avons ainsi ajusté notre calendrier jusqu’à la fin d’année civile. Cela implique non seulement les préparations mais aussi les célébrations. Je remercie vivement à cette occasion tous les bénévoles qui montrent une grande disponibilité.

B. Secrétariat :
Jusqu’au 11 mai, l’ouverture au public est impossible. Une permanence téléphonique et courriel est assurée chaque jour.
Inscriptions baptêmes et mariages continueront sur rendez-vous. Nous garderons encore plusieurs semaines cette manière de faire. L’exigüité du secrétariat nous oblige à cela et pour la santé de chacun d’entre vous et pour celle des bénévoles et salariées. Pour les intentions de messes, il est toujours possible de glisser sous enveloppe votre demande sous la porte du secrétariat. Il faut préciser bien sûr l’objet mais aussi votre nom et vos coordonnées téléphoniques pour que nous puissions vous confirmer la date souhaitée.

C. Catéchèse :
1. Première communion et Profession de foi : dès maintenant, nous avons fait le choix de programmer des nouvelles dates à la rentrée, avant la fête de la Toussaint. Nous espérons avec les catéchistes organiser une rencontre avec les enfants pour partager sur la manière dont ils ont pu vivre le confinement et laissé le Seigneur les accompagner, avant la fin de l’année.
2. Confirmation : une nouvelle date avec le père Dominique, notre évêque a été trouvée, en lien avec la paroisse de Doudeville, en octobre. Les animateurs réfléchissent à l’organisation de la retraite notamment.

Invoquons l’Esprit saint qui ne cesse de guider l’Église.
Il nous montrera les décisions que nous aurons à prendre et à assumer ensemble pour que continue la mission, annoncer au monde entier que “Dieu l’a fait Seigneur et Christ, ce Jésus que vous aviez
crucifié”(Ac 2,36).

Père Benoît Bréant, curé