Il y a un personnage très important dans la Bible et qui occupe la dernière partir du livre de la Genèse, celui qui ouvre l’Ancien Testament. Il s’appelle Joseph.
Ce Joseph est le onzième fils de Jacob et donc petit-fils d’Isaac et arrière petit-fils d’Abraham. Il est le fils, tard venu, de Rachel, l’épouse préférée de Jacob, et son « chouchou », ce qui provoque la jalousie de ses frères. La vie des familles polygames n’étaient pas toujours simple ! Un jour Jacob offre à Joseph une belle tunique à manches longues, ce qui renforce la jalousie des ainés, et d’autant plus que Joseph leur raconte des songes où toute la famille se prosterne devant lui. La jalousie devient haine. Les rivalités et les jalousies dans les fratries ne sont pas une invention récente !
Les dix ainés étant dans la campagne à garder le troupeau, Jacob envoie Joseph pour prendre des nouvelles, et c’est le drame ; ils dépouillent Joseph de la belle tunique et le jettent dans une citerne à sec sans s’occuper de ses cris. Passe une caravane de marchand se rendant en Egypte. L’affaire est vite conclue. Joseph échappe à la mort, mais le voilà esclave. Où sont ses rêves, et où est Dieu ?
Dieu est avec lui sans qu’il le sache, et il bénit, il fait réussir tout ce qu’il entreprend. Acheté par un monsieur Potiphar, il devient rapidement son régisseur, pour le plus grand bien du maître. Mais Madame Potiphar s’éprend de Joseph qui refuse de céder à ses avances, car il est juste. Alors la dame accuse Joseph d’avoir voulu la violer, et il se retrouve en prison.
Dieu est toujours avec lui et Joseph devient l’homme de confiance du gardien de la prison quand y arrivent deux grands personnages de la cour, le grand échanson qui mettait la coupe dans la main de Pharaon, et grand panetier qui veillait sue le pain et les pâtisseries que mangeait Pharaon : deux missions de confiance, car le poison était toujours à craindre. Les deux hommes ont chacun un songe dont Joseph leur révèle le sens : le panetier est pendu et l’échanson retrouve sa charge. « Parle de moi à Pharaon » demande Joseph, mais le panetier l’oublie.
Une nuit, Pharaon fait un songe ; sept vaches grasses que mangent sept vaches maigres et sept épis de blé bien pleins que mangent sept épis desséchés. Les magiciens d’Egypte sont incapables d’interpréter le songe. Alors l’échanson parle de Joseph qui bien sûr donne l’interprétation : sept années d’abondance vont précéder sept années de famine. Il suggère la politique à mener, faire des stocks pour affronter la pénurie. Et Joseph se retrouve Premier Ministre !
Quand arrivent les années de famine, le clan de Jacob n’est pas épargné, et il envoie ses fils en Egypte pour acheter du grain. Et voilà nos dix ainés devant Joseph qu’ils ne reconnaissent pas, mais qui comprend tout ce qu’ils disent entre eux. Ils se prosternent devant lui, et se réalisent les songes du jeune Joseph.
Il les interroge sur leur famille : leur vieux père Jacob est toujours vivant, et Rachel est morte en mettant au monde Benjamin un petit frère que Joseph ne connaît pas. Il exige qu’ils l’amènent avec eux quand ils reviendront. Le grain étant épuisé, Jacob les renvoie en acheter en Egypte, mais il se sépare difficilement de Benjamin. Finalement Joseph se fait reconnaître et renvoie ses frères avec mission de ramener leur père et toute la famille. « Vous avez voulu me faire du mal, mais Dieu a changé le mal en bien. » Joseph, homme juste sauve le clan qui deviendra un peuple en Egypte.

Passons maintenant au Joseph du Nouveau Testament le Joseph auquel le Pape François consacre cette année. Le début de l’Evangile selon Saint Matthieu nous permettra de faire connaissance avec lui.
Matthieu commence par la généalogie de Jésus : trois fois quatorze générations d’Abraham au Christ, avec la même formule qui se répète « X… engendra Y… , Y… engendra Z… » Mais la dernière est différente ; « Jacob engendra Joseph, l’époux de Marie, de laquelle fut engendré Jésus, que l’on appelle Christ. » Comme son lointain ancêtre, Joseph est fils d’un certain Jacob. Coïncidence ? Et surtout Matthieu évite de dire que Joseph engendra Jésus. De qui Jésus fut-il engendré ? Quel est le rôle de Joseph ?
En ce temps-là, on mariait les filles très jeunes. Ils étaient époux et épouse, avec le devoir de fidélité, mais sans habiter ensemble. Et Joseph découvre que Marie est enceinte.
Que doit-il faire ? Elle n’est pas enceinte de lui, elle l’est donc d’un autre et elle est adultère, un crime qu’il doit dénoncer et qui est puni de mort par lapidation. Non ! Il n’est pas possible que Marie se soit mal conduite. Il refuse de la dénoncer publiquement. Alors ? La prendre chez lui et donc reconnaître l’enfant qu’elle porte ? Joseph est fils de David, à qui Dieu a promis que le Messie naîtrait parmi ses fils. Alors introduire dans la lignée un enfant d’origine inconnue, pas possible non plus ! Joseph est « juste », il cherche à faire toujours la volonté de Dieu. Donc, il décide de s’effacer et de renvoyer Marie en secret.
Comme le patriarche Joseph, il reçoit la réponse. « L’ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit ‘Ne crains pas de prendre chez toi Marie ton épouse, car l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint ; elle enfantera un fils tu lui donneras le nom de Jésus (c’est-à-dire : le Seigneur sauve) car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés ? »
L’enfant que porte Marie vient donc de l’Esprit Saint. Comment ? Joseph n’en sait rien, et nous non plus. Il sait l’essentiel, et nous aussi, que tout cela est voulu par Dieu. Joseph obéît. En donnant le nom, il reconnait l’enfant et lui transmet l’héritage des promesses faites à David. C’est par Joseph que Jésus est le Messie.
Après la naissance à Bethléem, Matthieu nous raconte l’histoire des Mages. « Entrant dans la maison, ils trouvent l’enfant avec Marie sa mère. » Une maison, dans Bethléem! Qui, à la place de Joseph, ne se serait inquiété de trouver un vrai logement ? Et pourquoi Joseph est-il absent ? Sans doute travaille-t-il sur quelque chantier des environs ? Dans cette société où les rôles des hommes et des femmes sont nettement différenciés, Joseph se comporte en bon père de famille. Aux pères de famille d’aujourd’hui de l’imiter dans notre société.
Encore un songe, et comme le patriarche Joseph a installé le clan familial en Egypte, de même Joseph guide la fuite de la Sainte Famille en Egypte, et après la mort d’Hérode, la conduira à Nazareth. Et une trentaine d’années plus tard Jésus sera connu comme « le fils du charpentier ». Joseph père de famille, protecteur et éducateur de Jésus est donné en modèle aux pères d’aujourd’hui et de toujours.
La dernière fois que Joseph apparait dans l’Evangile, c’est chez Luc dans l’épisode de Jésus au Temple. Selon la coutume pour la fête de la Pâque, la famille monte en pèlerinage à Jérusalem (150 kms à pied), Jésus, l’année de ses douze ans, reste seul à Jérusalem. Inquiétude des parents. Ils le trouvent au bout de trois jours. « Pourquoi nous as-tu fait cela? Vois comme ton père et moi nous avons souffert en te cherchant ! » – « Comment se fait-il que vous m’ayez cherché ? Ne saviez-vous pas qu’il me fait être chez mon Père ? » Ils ne comprirent pas ce qu’il leur disait. Mystère de Jésus pour Joseph et Marie. Mystère de chaque enfant pour les parents de toujours.
Un homme « juste » cherchant ce que Dieu attend de lui, un père de famille responsable qui éduque son fils dans la foi et lui donne un métier, un père aussi confronté au mystère de son enfant. Un homme à admirer, un homme à prier, un homme à imiter !

Père Gérard Meybeck