Solennité de Tous les Saints – Cathédrale Notre-Dame, 1er novembre 2015

Solennité de Tous les Saints
Cathédrale Notre-Dame – Dimanche 1er novembre 2015

Lectures : l’Apocalypse (7, 2-4.9-14) ; Psaume 23 ; première lettre de saint Jean (3, 1-3) ; évangile selon saint Matthieu (5, 1-12a)

homélies 3 toussaintFrères et sœurs, les saints des vitraux et des statues de notre cathédrale sont nombreux ; cette semaine, je les ai regardés comme pour me préparer à notre fête de Tous les saints. J’en connais certains ; d’autres, comme saint Prétextat ou saint Evêque, me sont encore inconnus ! Ils font partie de la foule des saints que nous fêtons aujourd’hui, la foule des hommes et des femmes définitivement heureux.

Voyant les foules, Jésus gravit la montagne (Mt 5, 1). Que fait Jésus ? Cherche-t-il à fuir ? Non. Que fait-il ? Il voit les foules et les entraîne sur la montagne.

La montagne, dans l’aventure biblique, est le lieu de la rencontre avec Dieu. Le Sinaï, l’Horeb, la montagne de la transfiguration, appelé le mont Thabor, le mont Sion c’est-à-dire Jérusalem … sont les lieux où Dieu se révèle de plus en plus proche des hommes.

Jésus a pris la tête de l’humanité pour l’entraîner vers son Père. Sur la montagne, il s’assit et, dit l’évangéliste, ses disciples s’approchèrent de lui (ibidem). Qui sont les disciples ? Des hommes et des femmes extraordinaires ? Il ne semble pas. Les disciples sont ceux qui ont suivi Jésus sur la montagne, se sont approchés de Lui et l’écoutent.

Les saints ont suivi Jésus, ils se sont approchés, ils ont écouté. Je devrais d’ailleurs dire cela au présent : les saints suivent Jésus, les saints s’approchent, les saints écoutent Jésus, dans leur vie de tous les jours.

Autour de l’an 2000, j’ai rencontré le mari d’une femme béatifiée par le Pape Jean-Paul II. Il s’appelait Pietro. Elle Jeanne. Lui fabriquait des allumettes près de Milan. Elle était médecin exerçant dans un dispensaire, décédée au moment où elle mettait au monde son 4ème enfant. Au cours du repas où nous avait invité Pietro, il parlait de sa femme avec naturel, de leur voyage de noces, de l’éducation des enfants, de leur vie de tous les jours, de leurs disputes aussi. J’ai attendu le dessert pour lui poser la question qui brûlait mes lèvres depuis le début : « aviez-vous conscience que vous viviez avec une sainte, que vous preniez votre petit-déjeuner avec elle ? Saviez-vous qu’une sainte repassait vos chemises ? » Il me répondit « non … car elle se confessait plus souvent que moi ! » Il ajouta : « depuis j’ai compris : se confesser, c’est s’approcher encore plus de Jésus, c’est supprimer ce qui nous éloigne de Jésus ».

Les disciples s’approchèrent. Sans doute, Jésus les a-t-il attirés par son regard. Frères et sœurs, aimons regarder les saints, connaître leur vie, apprécier leur proximité avec Jésus et avec sa Parole, avec telle ou telle page d’Evangile, avec tel ou tel de ses gestes, avec son cœur. C’est notre vocation à tous : s’approcher de Jésus, approcher l’humanité de Jésus et, par Lui, de son Père. Tôt ou tard – nous y penserons davantage encore demain – nous serons en sa présence auprès du Père. C’est le sens de notre vie et de notre mort, de notre baptême qui nous unit mystérieusement à sa vie, plus forte que le mal et la mort. Par la confirmation, nous sommes marqués au front (cf. Ap 7, 3), l’Esprit Saint devient le compagnon intérieur de notre marche vers le Père, avec Jésus et par Lui.

L’Eglise à la suite de saint Paul, appelle ses membres « le peuple saint » (cf. 1 Co 6, 1), comme nous l’entendrons aussi dans la première prière eucharistique. Soyons disponibles, frères et sœurs, à la sainteté en nous laissant regarder par Jésus, en le laissant nous entraîner, en accueillant sa Parole de vie, parfois en nous blottissant dans une page d’évangile, sans doute en nous confessant plus souvent.

N’avons-nous pas envie de douceur, de consolation, de paix, de justice, de miséricorde ? N’avons-nous pas envie de voir Dieu, d’être dans son Royaume, d’avoir comme ami le bonheur ? Heureux ! L’Esprit Saint, de l’intérieur, nous guide vers cette montagne d’amour !

Avec vous, je rends grâce pour nos grands frères et nos grandes sœurs, la foule des saints. Ils ont cru dans le « grand amour » que le Père nous a donné. Ils sont devenus enfants de Dieu, pas à mi-temps ou à temps partiel, mais à plein temps ! « Bien-aimés, voyez quel grand amour nous a donné le Père pour que nous soyons appelés enfants de Dieu – et nous le sommes », dit saint Jean (1 Jn 3, 1).

Que notre participation à l’assemblée sainte de ce jour, ravive notre vocation d’être à plein temps des enfants de Dieu, ici, à la maison, dans nos paroles et nos pensées, au travail, en famille ou avec nos voisins. « Quiconque met en lui une telle espérance se rend pur come Lui-même est pur » (1 Jn 3, 3).

✠   Dominique Lebrun
Archevêque de Rouen