Solennité de l’Epiphanie Ordination diaconale de Stanislas Delcampe Eglise Saint-Maclou (Rouen) – Dimanche 3 janvier 2015

Solennité de l’Epiphanie
Ordination diaconale de Stanislas Delcampe

Eglise Saint-Maclou (Rouen) – Dimanche 3 janvier 2015

Lectures de la messe : Livre du prophète Isaïe (60, 1-6) ; Psaume 71 ; Lettre de saint Paul apôtre aux Ephésiens (3, 2-3a.5-6) ; Evangile selon saint Matthieu (2, 1-12)

Monition d’ouverture

Père Bertrand Laurent, c’est avec joie que je constate l’assemblée nombreuse venue célébrer l’Epiphanie du Seigneur dans l’église Saint-Maclou dont vous avez la charge avec la paroisse Saint-Marc de Rouen Est. Ce que nous avons à vivre ensemble ce matin s’insère dans le mystère de la manifestation du Fils de Dieu, le messie, le Sauveur du monde. Un diacre est donné à l’Eglise de Rouen pour manifester le salut donné par Jésus au monde. Nous sommes en communion avec tout le diocèse de Rouen mais aussi avec l’Eglise universelle, je pense à l’Eglise de Rome mais aussi au diocèse de Conceicao de Araguaia au Brésil et, plus proche de nous, aux monastères de Solesmes et de Saint-Wandrille. Ce que nous avons à vivre ? Prenons quelques instants pour nous disposer à ne pas être simplement des spectateurs ou des acteurs mais bien des hommes et des femmes qui ouvrent leur cœur à la joie de l’amour infini que Dieu désire et prépare pour eux.

Homélie

Frères et sœurs, « le monde entier marche vers Dieu ». Cher Stanislas, tu m’écrivais cela il y a quelques mois avant de savoir que tu serais ordonné diacre en la fête de l’Epiphanie : « Des mages venus d’Orient arrivèrent à Jérusalem et demandèrent : « Où est le roi des juifs qui vient de naître ?» (Mt 2, 1-2). Ils ont marché vers Dieu.

stanislas 1A vrai dire, tu m’écrivais ta décision de marcher avec le monde vers Dieu, et ton désir que le monde marche avec toi vers Lui. Nous sommes proches de l’attitude des mages. Ils cherchent le roi des juifs. Une étoile les guide (cf. Mt 2, 2). Ils comprennent qu’il est plus que le roi des juifs, le ciel et la terre sont à Lui. Peut-être est-il leur roi ? Mais où est-il ?

Stanislas, dans la foi de l’Eglise tu es ordonné diacre, une Eglise présente à tes côtés ce matin, heureuse de reconnaître en Jésus le Sauveur du monde. Sa foi la conduit à chercher Dieu, encore. En effet, chercher Dieu n’est pas réservé aux non-croyants. Chercher Dieu, c’est mettre tout son être au service de la révélation du mystère dont parle l’apôtre Paul (cf. Ep 3). Chercher Dieu est le propre de la personne qui entend son appel.

Le Pape Benoît XVI l’a magnifiquement développé en s’adressant au monde de la culture à Paris, l’année où tu rentrais au séminaire. Il expliquait à propos du rôle des moines dans la construction d’une Europe chrétienne : « Au milieu de la confusion de ces temps… les moines désiraient la chose la plus importante : s’appliquer à trouver ce qui a de la valeur et demeure toujours, trouver la Vie elle-même. Ils étaient à la recherche de Dieu. Des choses secondaires, ils voulaient passer aux réalités essentielles, à ce qui, seul, est vraiment important et sûr… derrière le provisoire, ils cherchaient le définitif »[1]. Ne sommes-nous pas au temps de la refondation de cette Europe qui te tient à cœur ?

stanislas 2Stanislas, ton baptême t’a déjà fait passer du provisoire de cette vie au définitif de la vie éternelle. Sur ce chemin, tu as entendu l’appel à consacrer ta vie au service de la quête du monde qui ressemble trop souvent à une errance. Il me semble que tu partages au plus intime de toi-même cette recherche. Le célibat qui t’est donné aujourd’hui comme une grâce et une mission ; il est le signe que même la fécondité naturelle ne suffit pas à combler la quête du cœur de l’homme. Seul Dieu peut suffire.

Ordonné diacre, tu seras Serviteur de la Parole de Dieu, sacrement de l’immense dialogue entre l’humanité et Dieu qu’elle cherche, un dialogue tissé d’événements, de gestes, de mots, de silence, d’attente, de surprises. Au cœur des Ecritures, il y a le grand livre des psaumes. Il ajoute la musique et la poésie à la réflexion sur l’histoire du monde, et dilate ainsi nos cœurs. Tu t’engages aujourd’hui à vivre ce dialogue au long des heures, chaque jour, en joignant ta voix à l’Eglise qui chante les psaumes. Ils t’aideront à « présenter à Dieu nos vies, avec leurs hauts et leurs bas, » et « à les transformer en un mouvement vers Dieu » pour reprendre les expressions de Benoît XVI dans la même allocution.

Chercher Dieu comme les mages est ton service, mais pas sans recueillir et partager les trouvailles. Qu’ont-ils trouvé les mages ? D’abord un roi inquiet pour son pouvoir (cf. Mt 2, 3). Stanislas, tu rencontreras des petits rois inquiets pour leur pouvoir, peut-être un évêque voire des curés. Ne sois pas inquiet pour le tien. Tu as plus qu’une étoile pour te guider. Il y a celle que, avec tes frères scouts entre autres, tu aimes saluer comme « étoile de la mer », la Vierge Marie. Tu as l’Eglise qui te guideras, l’évêque pécheur à qui tu promets obéissance, les prêtres et les diacres tes aînés, les consacrés qui cherchent Dieu de tout leur être, et le peuple de Dieu qui ne manquera pas de t’interroger.

Mais la trouvaille des mages est à la fois plus banale et impensable : le roi des juifs n’est qu’un enfant : « Ils entrèrent dans la maison, ils virent l’enfant avec Marie, sa mère » (Mt 2, 11). Peut-être ont-ils déjà croisé la louange des bergers de retour à leur travail, annonçant la bonne nouvelle. Notre ministère, Stanislas, est banal et impensable, malheureusement trop souvent incroyable pour nos cœurs alourdis par le péché. Des petits, tels des bergers, te montreront souvent la route de la joie.

Notre ministère c’est d’annoncer à ceux qui cherchent Dieu – au fond à toute l’humanité – que Dieu les cherche dans leur cœur d’homme et de femme en les invitant à ressembler à ce qu’ils sont : des cœurs d’enfant. Ils ont tant besoin d’amour pour grandir ! Ensemble, nous rencontrerons des obstacles à l’amour de Dieu. Ne te trompe pas d’ennemi : ce n’est pas le cœur de ceux à qui l’Eglise t’envoie qui est un obstacle, ce sont leurs encombrements et leurs blessures.

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Ne leur parle pas sans les aimer et les soigner au nom de Jésus, comme tu en as fait l’expérience forte au Brésil. La charité est la clé de notre mission. Témoigne aussi de ton cœur d’enfant, proche de celui de Jésus dans la crèche.

Stanislas, sois heureux d’être appelé à la révélation du mystère pour notre temps, « par l’annonce de l’Evangile », comme dit saint Paul (Ep 3, 6). Sois heureux d’avoir répondu « me voici ». Dieu n’attend rien d’autre de toi : ni or, ni myrrhe, ni encens mais l’offrande de ton être par amour, uni à l’offrande de Jésus (cf. Prière sur les offrandes de la messe de l’Epiphanie). En te prosternant dans quelques instants, tu seras comme Jésus enfant posé dans la crèche du monde. Cette union te conduira à l’accueil de l’Esprit Saint pour aller avec joie sur les chemins de la Seine-Maritime qui marche vers son Dieu.

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit.

 

✠   Dominique  Lebrun

Archevêque de Rouen.

[1] Benoît XVI, Discours au monde de la culture, Collège des Bernardins, Paris, 12 septembre 2008.

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