Cathédrale de Rouen – dimanche 17 septembre 2017

Vingt-quatrième dimanche du temps ordinaire (A)
Installation de l’abbé Alexandre Gérault
curé de la paroisse Notre-Dame de Rouen centre

Cathédrale de Rouen – dimanche 17 septembre 2017

Lectures : Lecture du livre de Ben Sira le Sage (27, 30 – 28, 7) ; Psaume 102 ;
Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains (14, 7-9) ; Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (18, 21-35)

Homélie

« Dans notre vie comme dans notre mort, nous appartenons au Seigneur » , dit Paul aux Romains (14, 8) et, aujourd’hui, aux Rouennais.

Alexandre, à qui appartiens-tu ? A qui appartient votre nouveau curé ? A qui appartient votre fils, pourrais-je aussi demander à ses parents.

Frères et sœurs, il arrive à l’évêque d’entendre des paroissiens lui dire : « vous n’allez pas nous enlever notre curé ». Une telle remarque me fait plaisir : visiblement les paroissiens en question aiment leur prêtre ; ils savent que leur prêtre les aime, et ils se font du bien mutuellement. Cependant, il m’arrive de soupçonner. « Vous n’allez pas nous enlever notre curé » n’aurait-il pas un petit accent d’égoïsme ? Pour m’assurer que ce n’est pas le cas, je réponds parfois : « Plus vous m’en direz du bien, plus cela me donnera des idées pour le mettre ailleurs … pour que d’autres en profitent ! »

« Dans notre vie comme dans notre mort, nous appartenons au Seigneur ». Alexandre, à qui appartiens-tu ? Je te confie la paroisse Notre-Dame de Rouen centre mais tu ne lui appartiens pas comme tu n’appartenais pas à la paroisse St Paul du Mesnil Plateau de Boos. Ta mission est d’appartenir de plus en plus au Seigneur et de conduire les paroissiens et les habitants à en prendre de plus en plus conscience : « ils appartiennent au Seigneur » : s’ils le veulent bien leur vie est entre ses mains.

C’est le propre du ministère du prêtre. Il vous est donné, avec les autres prêtres qui officient sur votre paroisse, pour être parmi vous et pour vous le Christ.

Vous  n’êtes pas une association ou un club qui aurait choisi une belle charte, fut-ce l’Evangile. Vous êtes choisis par le Christ pour marcher à sa suite, dans votre vie comme dans votre mort. En célébrant l’Eucharistie, le prêtre vous entraîne dans le retour de votre vie à Dieu par Jésus. Chaque eucharistie est un moment-source pour appartenir à nouveau et de plus en plus à Jésus qui nous entraîne vers son Père.

Avant-hier, un député m’interroge. Lui-même vient d’avoir une conversation avec le mari d’une femme ayant une sclérose en plaque. Elle veut mourir, disait-il, faisant allusion à l’euthanasie. Et le député me demande si nous pourrions en parler. Chaque question singulière, personnelle mérite d’être entendue, accompagnée, dialoguée. Il est important que chacun soit disponible pour dialoguer avec un voisin, un collègue, un ami et entende la souffrance. Mais je crois de plus en plus que la réponse aux questions éthiques dépendent de cette grande question : « Dans ma vie comme dans ma mort, à qui est-ce que j’appartiens ? ». Et j’accueille volontiers le conseil de Ben Sira le Sage : « Sois indulgent pour qui ne sait pas » (Si 28, 7). Mais nous, frères et sœurs, ne savons-nous pas ?

Le chrétien baptisé sait qu’il appartient à Dieu, à Jésus. Tel est notre chemin. Il vit cette appartenance en imitant Jésus dans le don de lui-même. C’est un combat de tous les jours. Le mari ou la femme se donne à son conjoint mais reste tenté de se reprendre. L’évêque se donne à son diocèse mais demeure tenté de se servir en honneur ou autre avantage. Peut-être en est-il ainsi du curé de la cathédrale. Le paroissien décide de rendre service à la communauté mais peut être tenté de faire de ce service sa propriété voire de son église sa propriété même si cela est difficile pour des églises qui ont vu des générations et sont communales ! Je pense à St Patrice, St Godard ou Ste Jeanne d’Arc qui appartiennent plus au Seigneur qu’à nous.

Frères et sœurs, soyons heureux et joyeux d’appartenir au Seigneur. Sur le chemin du don à la suite de Jésus, il y a le pardon. Jésus en parle avec force aujourd’hui dans l’Evangile. Alexandre, tu auras à veiller à ce que le sacrement du pardon soit possible, de plus en plus et de mieux en mieux pratiqué. Notre cathédrale a la grâce d’être un haut-lieu du sacrement du pardon, et j’en remercie les confesseurs présents et absents pour leur participation généreuse.

Je te rappelle, Alexandre, et à vous frères et sœurs, que j’ai institué le 3ème dimanche de carême comme dimanche pour se demander pardon en communauté. Ce n’est pas pour cela qu’il faut accumuler pendant le reste de l’année soixante millions d’offense (cf. Mt 18, 24)!

Frères et sœurs, le Père Alexandre vous transmettra mon souhait de voir nos communautés grandir en fraternité dans la proximité. Ecoutez-le car je crois que c’est vraiment le bon chemin pour l’évangélisation.

Merci, Père Alexandre, d’être toi-même un frère pour être un bon pasteur !

✠  Dominique Lebrun
Archevêque de Rouen.